Les propos du cardinal Fridolin Ambongo ont fait bondir Alex Dende, artiste musicien engagé connu sous le pseudonyme de Lexxus Legal. L’artiste et acteur politique estime que les déclarations du prélat, qualifiant la musique et la danse de signes de superficialité et de médiocrité, sont injustes, blessantes et surtout en décalage avec la profondeur réelle de la culture congolaise.
Pour Alex Dende, la musique et la danse ne sont pas de simples distractions futiles. Elles représentent les derniers espaces de résistance, de mémoire et d’expression dans un pays traversé par une crise profonde, multidimensionnelle et violente.
« Est-ce donc à cause de la musique que des provinces entières, dans l’est de notre pays, sont aujourd’hui entre les mains de groupes armés, pendant que certains généraux fuient leurs responsabilités ?
Est-ce la danse qui a installé la corruption au sommet de l’État, dans les institutions, jusque dans les églises ?
Est-ce la chanson qui a rendu la justice malade, au point que Fatshi lui-même le reconnaît ? », s’est-il interrogé.
L’ancienne gloire du rap congolais rappelle au cardinal Fridolin Ambongo que ce ne sont pas les musiciens qui sont responsables de l’effondrement du système éducatif. « Est-ce la musique qui a réduit les professeurs au silence, parfois même à la complicité ?
Est-ce encore la scène musicale qui a creusé les inégalités sociales, affaibli l’économie, détruit l’espoir des jeunes ? », s’indigne Lexxus.
Plus loin, le militant proche de l’opposant Martin Fayulu dénonce une attitude qui consiste à faire porter aux artistes la responsabilité de tous les maux, alors que les acteurs de tous les secteurs ont leur part de responsabilité. Lexxus Legal rappelle d’ailleurs que « dans la tradition biblique, on chante pour Dieu, on danse pour la vie, on joue pour ne pas mourir.
David dansait devant l’Arche, les psaumes sont des chants, et Jésus lui-même n’a jamais condamné la joie du peuple. Au contraire, il s’est toujours tourné vers celles et ceux qui, par leur parole ou leur chant, touchaient les cœurs », souligne-t-il.
Tout en rejetant la thèse selon laquelle la musique tire le pays vers le bas, Lexxus Legal affirme au contraire qu’elle le maintient debout.
Elle crie quand d’autres se taisent.
Elle rassemble quand tout divise.
Elle console quand tout blesse.
Elle dit la vérité que d’autres redoutent.
Pour lui, le vrai problème n’est pas la prétendue superficialité des artistes, mais l’incapacité de ceux qui prétendent incarner la profondeur à changer les choses.
Enfin, Alex Dende appelle à la reconnaissance des efforts des artistes. En conclusion, il réplique au cardinal en affirmant qu’il est tout à fait normal qu’un peuple trahi, méprisé, exploité et meurtri par son élite canalise son expression pour ne pas disparaître — et tant mieux si le monde le reconnaît pour cela.
RM