Nouveau rebondissement dans le dossier judiciaire visant l’ancien Premier ministre Augustin Matata Ponyo. Un échange tendu s’installe entre la Cour constitutionnelle et l’Assemblée nationale, sur fond de respect des procédures liées aux immunités parlementaires. Dans une lettre adressée ce mardi 29 avril au président de la Haute Cour, Dieudonné Kamuleta, le président de l’Assemblée nationale, Vital Kamerhe, rappelle les garanties constitutionnelles qui protègent les élus.
« Aucun parlementaire ne peut être poursuivi ou arrêté sans l’autorisation préalable de la chambre à laquelle il appartient, sauf en cas de flagrant délit », insiste le speaker de la chambre basse, en citant l’article 107 de la Constitution. Kamerhe appelle donc le procureur général près la Cour constitutionnelle à se conformer à cet impératif légal, avant d’engager toute procédure contre un parlementaire en fonction.
Cette sortie fait écho aux tensions observées lors de l’audience du 23 avril dernier, au cours de laquelle le président de la Haute Cour avait dénoncé « une entrave à la justice » imputée à l’Assemblée nationale. Pour Dieudonné Kamuleta, cette dernière ne saurait « donner des injonctions ni intervenir dans un procès en cours », mettant en garde contre toute forme d’ingérence dans une procédure judiciaire en cours.
En toile de fond de cette bataille institutionnelle : le très sensible dossier Bukanga Lonzo. Augustin Matata Ponyo est accusé de détournement de fonds publics destinés à ce méga projet agro-industriel. L’Assemblée nationale, tout en affirmant son respect de la justice, semble vouloir s’assurer que la procédure respecte scrupuleusement le cadre constitutionnel.
Rappelons que le ministère public a requis, le 23 avril dernier, une peine de 20 ans de travaux forcés contre l’opposant et député national, Augustin Matata Ponyo et l’ancien gouverneur de la Banque centrale, Déogratias Mutombo, dans le cadre du détournement présumé de 80 millions de dollars liés au projet agro-industriel de Bukanga Lonzo. Il a également demandé leur arrestation immédiate, ainsi qu’une interdiction des droits civiques et d’éligibilité : 10 ans pour Matata, 5 ans pour Mutombo, à l’issue de leur peine.
Quant à l’homme d’affaires sud-africain Christophe Grobler, accusé d’un détournement de 15 millions de dollars, le parquet a requis 20 ans de travaux forcés, son arrestation immédiate et son expulsion définitive du territoire congolais après l’exécution de la peine.
Absents à l’audience, les trois justiciables ont été jugés par défaut. Le président de la Cour, Dieudonné Kamuleta, avait rejeté les arguments avancés par leurs avocats, notamment les tentatives d’invoquer des immunités parlementaires ou des justifications médicales jugées non conformes à la loi. Le certificat de Grobler, par exemple, n’était pas signé par trois médecins comme l’exige la procédure.
Quant à l’élu de Kindu, Matata Ponyo, le juge président avait estimé que l’Assemblée nationale n’avait émis aucun acte officiel levant ses immunités, précisant que « la justice reste indépendante du pouvoir législatif ». La sentence annoncée pour le 14 mai 2025.
CKK