L’Inspection Générale des Finances (IGF) se positionne comme service pionnier de contrôle des finances publiques en RDC. Engagée dans la lutte contre la corruption et le détournement de deniers publics, l’IGF se transporte partout où se manipule les fonds publics. C’est le cas dans le projet d’octroi de carte d’identité aux congolais.
Lancée en premier lieu en faveur de quelques chefs de corps et certains groupes socioprofessionnels, notamment, des journalistes, des magistrats, l’opération de délivrance de la carte d’identité nationale s’est arrêtée en chemin pour semble-t-il, ne plus se poursuivre. La présence impromptue de l’IGF dans ce projet d’identification des congolais, a visiblement dénudé une mafia au point de bloquer la machine.
Citée dans une enquête de Bloomberg et Actualité.cd, l’IGF qui a dû fourrer son nez dans le contrat qui devrait lier l’Etat Congolais au consortium d’entreprises retenu pour exécuter ce projet, a décelé des irrégularités qui entourent ledit projet qui, selon l’Office National d’Identification de la population (ONIP), devrait coûter environ 360 millions de dollars américains.
L’enquête évoque cependant, plus d’un triplement de chiffres. « Lorsqu’un consortium comprenant le leader français de la biométrie Idemia et le partenaire local Afritech s’est imposé comme fournisseur privilégié, le coût proposé avait grimpé à 1,2 milliard de dollars, soit plus de trois fois l’estimation initiale de l’ONIP. Un coût qui en ferait l’un des contrats d’identité numérique les plus onéreux de l’histoire de l’Afrique ».
La même enquête renseigne que « selon une note confidentielle de 160 pages rédigée en juillet 2023 et portant les logos d’Idemia et d’Afritech, ce montant – dont près de 60 % proviendraient du gouvernement et le reste des entreprises participantes, comprenait le coût de 8 000 kits d’enregistrement biométrique, l’ouverture de plusieurs centaines de centres d’inscription et la production initiale de 10 000 cartes d’identité pour l’élite de Kinshasa. Selon la proposition, une fois le contrat signé, l’ensemble de la population du Congo estimée à environ 100 millions d’habitants, pourrait être enregistrée dans un délai de 17 mois ».
Dans le cadre de ce contrat, l’Etat RD-congolais a déjà décaissé 20 millions de dollars. Cette somme est cependant bloquée par l’IGF qui, après avoir passé au peigne fin la copie ONIP-AFRITECH, a décelé des zones d’ombre. Le service dirigé par Jules Alingete avait, pour ce faire, transmis en juin dernier, une note d’observations à l’ancien VPM de l’Intérieur, Peter Kazadi, reprenant chacun de ces problèmes. Et ce, en plus d’exiger des «réponses satisfaisantes» comme «préalables pour la poursuite de ce projet».
Dans un rapport cinglant publié en juin, l’IGF a déclaré que ce qu’elle a appelé le « consortium Idemia-Afritech » ne disposait pas d’un capital suffisant pour exécuter le projet et prévoyait d’en retirer trop d’argent au fil du temps. L’IGF s’est également inquiétée du fait que les coûts d’infrastructure proposés étaient excessifs et que le principal mécanisme de financement du gouvernement, permettant au consortium de contracter un prêt commercial garanti par la banque centrale congolaise, qu’il prêterait ensuite au gouvernement pour couvrir la part du gouvernement dans les coûts – était « illégal ou impossible ».
L’Inspection Générale des Finances prouve encore une fois qu’elle demeure le plus éveillé des services de contrôle des finances publiques en RDC.
Christian-Moses Masunga