Alors que la République démocratique du Congo (RDC) s’apprête à entamer des négociations directes avec le groupe armé M23, le Dr Denis Mukwege, met en garde contre une « erreur de diagnostic majeure ». Dans une déclaration, il insiste sur la nécessité d’une approche internationale pour résoudre durablement la crise sécuritaire dans l’est du pays, appelant à la tenue d’une Conférence internationale pour la paix en RDC.
Pour le prix Nobel de la paix, la guerre qui ravage l’est de la RDC ne peut être réduite à un simple conflit interne entre le gouvernement congolais et le M23. Il rappelle que plusieurs pays de la région – le Rwanda, l’Ouganda et le Burundi – sont directement impliqués, tandis que d’autres puissances, notamment à travers l’exploitation des minerais stratégiques congolais, exercent une influence non négligeable.
Face à cette complexité, il estime que toute tentative de dialogue bilatéral avec le M23, sans une implication régionale et internationale élargie, revient à nier les véritables causes du conflit et risquerait de consolider l’occupation illégale de certaines zones congolaises.
-Un appel à une solution globale et concertée-
Mukwege plaide donc pour une Conférence internationale sur la paix en RDC, qui permettrait :
• De revitaliser l’Accord-Cadre d’Addis-Abeba, signé en 2013 mais resté en grande partie inappliqué,
• D’élaborer une feuille de route claire et concertée à l’échelle nationale, régionale et internationale,
• De mobiliser les ressources nécessaires pour stabiliser durablement la région.
Selon lui, une telle conférence garantirait que toute solution s’inscrive dans un cadre diplomatique structuré, plutôt que dans des négociations menées sous la menace des armes.
-La pression internationale, un levier essentiel-
Mukwege rappelle également l’importance d’appliquer la résolution 2773 du Conseil de sécurité de l’ONU, qui exige :
• Un cessez-le-feu immédiat et inconditionnel dans l’est de la RDC,
• Le retrait sans conditions de l’armée rwandaise, accusée de soutenir le M23.
Il exhorte donc la communauté internationale à faire respecter cette résolution, plutôt que de favoriser des négociations directes qui risqueraient de légitimer la loi du plus fort.
Le Dr Mukwege met en garde contre les erreurs stratégiques déjà commises par le passé, où des accords précipités ont souvent abouti à la perpétuation de la violence. Il préconise que toute future négociation :
• Inclue tous les groupes armés, la société civile, les partis politiques et le gouvernement,
• Respecte les principes fondamentaux de l’Union africaine, garantissant la souveraineté et l’intégrité territoriale de la RDC.
Sans ces précautions, Mukwege craint que le pays ne s’engage dans une voie menant à sa balkanisation, voire à l’annexion progressive des Kivus.
Le toubib exhorte tous les acteurs congolais et internationaux à tirer les leçons du passé et à éviter les compromissions qui pourraient hypothéquer l’avenir de la RDC. Il appelle à une action collective et déterminée pour assurer au peuple congolais son droit fondamental à vivre en paix et à disposer de son territoire.
PM